L’ensemble des nouvelles mesures issues de la loi de Finances 2024 afférentes à la lutte contre la délinquance fiscale et le renforcement du contrôle opéré par les agents de l’administration :

La lutte contre la délinquance fiscale est au cœur des préoccupations gouvernementales, et la loi de Finances 2024 se positionne comme un levier majeur pour renforcer le contrôle fiscal en France. Cet article explorera en détail les nouvelles mesures instaurées par cette loi, visant à réprimer la fraude et à renforcer les pouvoirs de l’administration fiscale pour sanctionner les infractions et différents schémas de fraude en France. Nous analyserons les implications de ces changements, les domaines spécifiques touchés et les conséquences pour les contribuables..

 
contrôle fiscale

Plusieurs points de la loi de finances 2024 ont pour objectif de venir renforcer la répression de la fraude aux finances publiques, plus précisément en ajoutant des mesures en matière de contrôle fiscal.

Depuis plusieurs années, les règles de répression se sont accentuées, un nouveau durcissement des règles en matière d’obligations fiscales, ainsi qu’un renforcement des sanctions fiscales encourues, ont été apportés par la loi de Finances 2024.

 

A ce titre, et à compter du 1er janvier 2024, la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023, instaure plusieurs innovations en matière de répression fiscale, qu’il convient d’analyser article par article afin d’appréhender l’importance de l’ensemble de ces mesures anti-fraude :

À partir du 1er janvier 2024, la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 introduit plusieurs changements significatifs dans la répression fiscale, nécessitant une analyse détaillée.

1. Les Points Clés de la Loi de Finances 2024

1.1. Extension du champ d’application de l’Article 155 A du code général des impôts

  • L’article 10 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 sur le champ d’application de l’article 155 A du Code Général des Impôts, relatif aux rémunérations de services versées à l’étranger, celui-ci est étendu aux sommes versées en contrepartie de l’exploitation commerciale de droits attachés à l’image, au nom ou à la voix, de l’usage de droits d’auteurs ou de la propriété industrielle ou commerciale.

  • Désormais, il couvre les rémunérations de services versées à l’étranger, ainsi que les sommes liées à l’exploitation commerciale de droits tels que l’image, le nom, la voix, ou les droits d’auteurs.

1.2. Renforcement des moyens de contrôle fiscal

La Loi de Finances 2024 en France marque un tournant significatif dans la lutte contre la fraude fiscale, avec les articles 112 à 116 instaurant des dispositions novatrices en matière de contrôle fiscal. Dans cet article, nous explorerons des exemples concrets d’application de ces articles, soulignant leur impact sur les contribuables et l’administration fiscale.

Les dispositions de l’article 112 visent à moderniser les méthodes de contrôle fiscal en adaptant les procédures aux enjeux de l’économie numérique. Concrètement, cela permet à l’administration fiscale de mener des enquêtes en ligne pour détecter et sanctionner les fraudes à la TVA. Prenons l’exemple d’une entreprise de commerce électronique qui vend des produits en ligne. L’administration peut désormais exploiter les informations accessibles publiquement sur les réseaux sociaux et autres plateformes numériques pour détecter d’éventuelles irrégularités fiscales.

L’article 112 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 a pour objet le renforcement des moyens de contrôle fiscal de l’administration fiscale en matière fiscale, notamment en matière de détection et de sanction fiscale et du cadre juridique applicable aux fraudes à la TVA, en l’adaptant aux enjeux de l’économie numérique, plus précisément, l’administration va pouvoir mener de nouvelles procédures d’enquête sur internet. Il introduit des mesures significatives pour renforcer les moyens de contrôle fiscal de l’administration.

Cela inclut des procédures d’enquête sur internet, permettant aux agents de mener des investigations plus approfondies dans le contexte de l’économie numérique.

L’administration est dorénavant autorisée à rechercher les abus de droit ou les manœuvres frauduleuses mentionnés à l’article 1729 du Code Général des Impôts qui ont mené à une minoration ou à une dissimulation partielle ou totale de recettes, et non seulement à ceux ayant permis une domiciliation fictive à l’étranger ;

Les agents de l’administration et de la douane sont amenés dorénavant à collecter les contenus manifestement rendus publics par leurs auteurs et publiquement accessibles sur les sites internet des réseaux sociaux et autres plateformes, telles que définies par le Règlement Européen relatif au marché unique des services numériques (Règlement (UE) 2022/2065 du Parlement européen et du Conseil du 19 octobre 2022 relatif à un marché unique des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE (règlement sur les services numériques), et cela même lorsque l’accès à ces plateformes requiert une inscription à un compte sur la plateforme en question.

1.3. Nouvelles dispositions pour détecter les fraudes à la TVA

L’article 112 adapte le cadre juridique applicable aux fraudes à la TVA, en particulier pour mieux répondre aux enjeux de l’économie numérique. Ces dispositions visent à détecter et sanctionner plus efficacement les fraudes liées à la TVA.

1.4. Création d’un délit de mise à disposition d’Instruments facilitant la fraude

  • L’article 113 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 sur la création d’un délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale, ce dernier vise les personnes physiques (PP) ou morales (PM) mettant à disposition de tiers des moyens, services, actes ou outils leur permettant de se soustraire à leurs obligations fiscales, conformément aux dispositions de l’article 1744 du Code Général des Impôts.

  • Ces dispositions donnent à l’administration fiscale le pouvoir de rechercher les abus de droit ou les manœuvres frauduleuses ayant entraîné une minoration ou une dissimulation de recettes. Imaginons une société qui, dans le but de réduire sa base imposable, a mis en place des mécanismes d’optimisation fiscale contestables. Grâce à cet article, l’administration peut enquêter sur ces pratiques et prendre des mesures appropriées.

1.5. Renforcement de la réponse pénale aux fraudes fiscales

  • L’article 114 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 sur le renforcement de la réponse pénale aux fraudes fiscales, avec une peine complémentaire de privation des droits à réductions et crédits d’impôt sur le revenu et sur la fortune immobilière (FI).

  • Ces dispositions introduisent un délit spécifique pour ceux qui mettent à disposition des tiers des moyens facilitant la fraude fiscale. Par exemple, une personne morale qui fournit des conseils ou des outils visant à échapper à ses obligations fiscales pourrait être poursuivie pour ce délit. Cela dissuade les acteurs de participer activement à des schémas de fraude fiscale.

  • Il accentue en conséquence fortement la répression des fraudes fiscales.

En vertu de l’article 115, une peine complémentaire peut être imposée, privant le contribuable reconnu coupable de fraudes fiscales de certains avantages fiscaux. Prenons l’exemple d’un contribuable qui a délibérément omis des revenus dans sa déclaration de revenus pour bénéficier de crédits d’impôt. S’il est condamné, il pourrait se voir priver de ces avantages fiscaux pour une période déterminée.

1.6. Contrôle accru des prix de transfert des sociétés multinationales

  • L’article 116 vise à assurer une plus grande transparence dans les transactions entre sociétés d’un même groupe opérant à l’échelle internationale. Supposons qu’une filiale française d’une société multinationale vende des biens ou services à une filiale étrangère du même groupe. L’administration peut désormais examiner de près ces transactions, s’assurant qu’elles respectent les règles de prix de transfert et qu’elles ne conduisent pas à des évasions fiscales.

  • Cette disposition de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 étend le renforcement du contrôle des prix de transfert des sociétés multinationales, grâce à l’extension du champ de l’obligation de tenir une documentation précise et à disposition, augmentation de l’amende encourue, l’institution d’une présomption de transfert indirect de bénéfices en cas de discordance manifeste entre la documentation et les prix effectivement pratiqués en réalité.

  • Il introduit une présomption de transfert indirect de bénéfices en cas de discordance manifeste entre la documentation des dossiers fournis à l’administration lors des procédures et les prix réellement pratiqués.

  • Par ailleurs, l’administration est désormais autorisée à utiliser les résultats postérieurs à la date de transfert d’actifs incorporels difficiles à évaluer pour rectifier, pendant un délai de reprise de 6 années, l’évaluation retenue.

Les articles 112 à 116 de la Loi de Finances 2024 marquent une étape importante dans le renforcement du contrôle fiscal en France. En introduisant des outils plus efficaces et des sanctions dissuasives, ces dispositions visent à garantir l’équité fiscale et à décourager toute tentative de fraude. Les contribuables doivent être conscients de ces changements et veiller à respecter scrupuleusement leurs obligations fiscales pour éviter d’éventuelles sanctions.

2. Le renforcement du contrôle opéré par l’administration afin de lutter contre la délinquance fiscale

La Loi de Finances 2024 en France apporte des modifications substantielles dans le domaine fiscal, visant à renforcer le contrôle et à réprimer la fraude. Parmi les dispositions clés, les articles 117 à 123 introduisent des changements significatifs, allant de l’amélioration des conditions matérielles des contrôles fiscaux externes à la pérennisation du régime d’indemnisation des aviseurs fiscaux.

Article 117 : Amélioration des conditions matérielles des contrôles fiscaux externes

Cet article vise à optimiser les procédures de contrôles fiscaux en permettant à l’administration de choisir le lieu de réalisation des contrôles sur place. Auparavant, le contribuable pouvait influencer la localisation du contrôle, ce qui limitait l’efficacité de l’administration. Désormais, elle peut imposer le lieu du contrôle, renforçant ainsi sa capacité à mener des enquêtes approfondies.

De plus, l’article assouplit le dispositif de protection de l’identité des agents de contrôle, facilitant ainsi la réalisation des contrôles sans compromettre la sécurité des agents. Ces mesures ont pour objectif d’accroître l’efficacité des contrôles fiscaux externes et de dissuader les comportements frauduleux.

Article 119 : Déclaration et enregistrement par le service national d’enregistrement (SNE)

L’article 119 introduit des changements substantiels concernant les déclarations de cession de parts sociales, de dons de sommes d’argent et de successions. Désormais, le Service National d’Enregistrement (SNE) étend sa compétence aux déclarations de successions à partir de l’année 2024. Cette mesure vise à centraliser les procédures, simplifiant ainsi le processus et assurant une gestion plus efficace des déclarations.

L’article abroge également les dispositions antérieures relatives au lieu de dépôt des déclarations, offrant ainsi une clarification essentielle. La compétence du SNE pour traiter les réclamations ou demandes gracieuses liées à ces déclarations est étendue, éliminant les incohérences précédentes.

L’article 119 est en conséquence afférent à l’extension de la déclaration et l’enregistrement par le SNE (Service National d’Enregistrement mis en place par arrêté du 28 janvier 2021), aux déclarations de successions à compter de l’année 2024. Cependant, les services territoriaux de la Direction Générale des Finances Publiques désignés expressément par les textes pour recevoir les déclarations papier restent seuls compétents pour recevoir les réclamations ou demandes gracieuses afférentes à ces déclarations. Afin de mettre fin à cette incohérence, les dispositions actuelles du Code Général des Impôts relatives au lieu de dépôt des déclarations de cession des parts sociales (CGI art. 653), de dons de sommes d’argent (Article 790 G du dit-code) et de successions (Article 656 du dit-code) sont abrogées.

Le soin de fixer les modalités de dépôt des déclarations par voie physique ou par voie dématérialisée sera confié au pouvoir réglementaire, permettant l’extension de la compétence du SNE au traitement des réclamations ou demandes gracieuses afférentes aux déclarations qui lui sont transmises comme susmentionné ;

L’article 119 sur l’intégration aux actes et déclarations ayant pour objet une cession de participations dans une personne morale (PM) à prépondérance immobilière, des informations expresses démontrant si la personne morale est une société immobilière de copropriété, si la cession confère au cessionnaire le droit à la jouissance d’immeubles ou de fraction d’immeubles et si le cessionnaire a acquitté ou s’engage à acquitter des dettes contractées auprès du cédant par la personne morale. Cette mesure a vocation à s’appliquer dès le 1er janvier 2024 ; 

Article 120 : Intégration aux actes et déclarations des informations sur les participations dans une personne morale à prépondérance immobilière

Cet article introduit des informations expressément démontrant si la personne morale est une société immobilière de copropriété. Il inclut également des données sur le droit à la jouissance d’immeubles, ainsi que sur le paiement des dettes contractées auprès du cédant par la personne morale lors de la cession de participations. Cet article a trait à l’obligation de notification à laquelle sont liés les intermédiaires soumis au secret professionnel au regard de certains dispositifs transfrontières DAC6, à la suite de la décision CJUE, 8 dec. 2022, aff. C-694/20 Orde van Vlaamse Balies e.a, présentant un caractère potentiellement agressif est mise en conformité avec l’article 7 de la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne : ils ne sont désormais tenus à la notification de l’obligation déclarative qu’au seul intermédiaire ayant la qualité de client (entraînant une modification de l’article 1649 AE du Code Général des impôts)

L’objectif de cette mesure est de renforcer la transparence dans les transactions immobilières impliquant d.es personnes morales à prépondérance immobilière. Ces nouvelles informations permettent une évaluation plus précise des implications fiscales et contribuent à prévenir les pratiques fiscales abusives.

Articles 122 et 123 : renforcement des procédures de visite et de saisie domiciliaires et pérennisation du régime d’indemnisation des aviseurs fiscaux

Les articles 122 et 123 sont axés sur le renforcement des moyens à la disposition de l’administration fiscale pour mener des investigations. L’article 122 permet une optimisation des procédures de visite et de saisie domiciliaires, offrant une plus grande flexibilité pour garantir l’efficacité des enquêtes.

Quant à l’article 123, il pérennise le volet expérimental du régime d’indemnisation des aviseurs fiscaux. Cette mesure vise à encourager la dénonciation des comportements frauduleux en offrant une compensation aux informateurs. Le montant des droits éludés doit être supérieur à 100 000 € pour que le régime s’applique.

Les articles 117 à 123 de la Loi de Finances 2024 marquent une évolution significative dans la législation fiscale française. Ces mesures visent à accroître l’efficacité des contrôles fiscaux, à renforcer la transparence dans les transactions immobilières et à encourager la dénonciation des fraudes.

3. Implications et conséquences pour les contribuables

La loi de Finances 2024 apporte des changements significatifs, nécessitant une adaptation rapide des contribuables aux nouvelles règles. Les implications sont multiples, allant de la nécessité de revoir les pratiques commerciales à l’importance de garantir une documentation précise sur les prix de transfert.

3.1. Importance de la conformité pour éviter les sanctions

Avec le renforcement des moyens de contrôle et l’extension du champ d’application des dispositions fiscales, la conformité devient cruciale. Les contribuables doivent s’assurer de respecter scrupuleusement les nouvelles règles pour éviter les sanctions.

3.2. Adaptation aux nouveaux pouvoirs d’enquête sur Internet

Les entreprises opérant dans le domaine numérique doivent particulièrement prêter attention aux nouveaux pouvoirs d’enquête sur internet. Cela souligne l’importance de maintenir des pratiques transparentes et conformes aux lois fiscales.

3.3. Réflexion sur les stratégies de prix de transfert

Avec le contrôle accru des prix de transfert, les entreprises multinationales doivent revoir leurs stratégies pour minimiser les risques de discordance manifeste. La documentation précise devient un outil essentiel pour justifier les prix de transfert pratiqués.

Conclusion

La loi de Finances 2024 représente une étape significative dans la lutte contre la fraude fiscale. Les nouvelles mesures, allant de l’extension du champ d’application à la création de délits spécifiques, renforcent les pouvoirs de l’administration fiscale. Les contribuables doivent être conscients de ces changements, adapter leurs pratiques et garantir une conformité rigoureuse pour éviter les sanctions. La vigilance et la compréhension approfondie des nouvelles dispositions seront essentielles dans ce contexte évolutif de répression du délit de fraude fiscale.

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